Une vue des futurs espaces d’exposition du Musée de l’Elysée, dans lesquels interviendra en novembre Christian Marclay. ©Mathieu Gafsou

A l’occasion de la remise des clés de leur nouveau bâtiment, le Musée de l’Elysée et le Mudac ont proposé une carte blanche à l’artiste genevois.

Les 6 et 7 novembre prochain, quatorze mois après la fermeture du Musée de l’Elysée et du Mudac (Musée de design et d’arts appliqués contemporains) dans leurs espaces historiques, au cœur de la campagne éponyme proche du lac pour le premier, face à la cathédrale dans la vieille ville pour le second, le public va enfin pouvoir pénétrer dans le nouvel écrin abritant les deux institutions sur le site de Plateforme 10. Comme pour le MCBA (Musée cantonal des beaux-arts), qui y a pris ses quartiers il y a deux ans, il s’agira d’un week-end portes ouvertes permettant de découvrir des espaces vierges, avant qu’ils n’accueillent dès le mois de juin 2022 leurs premières expositions.

Si les cimaises seront intactes, le bâtiment, qui a été conçu par le bureau portugais Aires Mateus e Associados, connaîtra néanmoins une première intervention artistique à travers une carte blanche confiée au plasticien et musicien Christian Marclay. Né en Californie, travaillant aujourd’hui à Londres, le Genevois mène depuis la fin des années 1970 une démarche hybride, entre matières sonores et visuelles, qui lui a valu en 2011 le Lion d’or de la Biennale de Venise pour sa vidéo The Clock. Une installation dans laquelle il effectue un décompte de vingt-quatre heures à l’aide d’un imposant montage d’extraits de films où apparaît, à travers le son ou l’image, la mention d’une heure exacte.

«L’idée est avant tout de présenter le lieu»

A Lausanne, il va travailler à partir de la matière photographique, des vastes collections de l’Elysée et, en ce qui concerne le Mudac, des images documentant les objets que possède le musée, que ce soit dans le design, la céramique ou la joaillerie contemporaine. «En réalité, il ne s’agit pas véritablement d’une carte blanche, souligne-t-il, puisque l’idée est avant tout de présenter le lieu et de célébrer l’architecture plutôt que mon intervention… Je vais d’ailleurs faire attention à ce qu’elle ne soit pas trop dérangeante.»

Christian Marclay au Kunsthaus de Aarau, août 2015. ©Christian Beutler/Keystone

«Intervenir sans trop intervenir»: depuis son atelier londonien, Christian Marclay raconte qu’à l’origine, il avait imaginé créer une ambiance sonore dans laquelle le public se déplacerait à la découverte du bâtiment. «Mais quand j’ai vu les possibilités qui s’offraient avec les collections de l’Elysée et du Mudac, je me suis dit que j’allais plutôt remplir les espaces avec des images.» Son projet prendra la forme d’un diaporama qui habillera le futur Musée de l’Elysée, situé à l’étage inférieur, tandis qu’au Mudac, au premier étage, seront installés des écrans plats. L’idée est que les personnes venant découvrir le bâtiment soient attirées vers l’architecture par les images, résume l’artiste.

Cinquante mille photographies

«En ce qui concerne l’Elysée, j’ai eu accès à quelque 50 000 photographies de toutes formes, cela va de René Burri à Sabine Weiss, d’Ella Maillart à Nicolas Bouvier en passant par des anonymes et des noms que je connais mal. Il y a énormément de diversité et des images de toutes les époques. Découvrir cette masse m’a donné beaucoup de liberté. Et comme je ne suis pas historien de l’art, curateur ou commissaire d’exposition, mon approche est très ludique. Dans la lignée de ce que je fais avec le ready-made et les objets trouvés, je ne cherche pas à être didactique, à faire passer un message.»

Les images projetées le seront de manière aléatoire, sans synchronisation, précise encore le Genevois. Il évoque une invitation faite aux visiteurs de se raconter leur propre histoire, d’interpréter ce qu’ils verront de la manière dont ils le souhaitent. Après avoir découvert les bases de l’édifice lors de sa dernière venue en Suisse, en août de l’année dernière, il espère pouvoir venir voir l’avancée du chantier en juin. Mais comme les travaux auront lieu jusqu’au dernier moment, il ne disposera cet automne que de quelques jours pour mettre au point son intervention. «En novembre, les journées sont courtes. Se posera également la question de la lumière», anticipe-t-il déjà.

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